Edito
Éditorial
L’adoption de papier… Geneviève Miral
La maison de papier de Françoise Mallet-Joris* était une maison pleine d’enfants, de baignoires qui ne se vident pas, de rangement aléatoire, d’animaux de passage. Une maison de vie, d’amour et de tendresse. On en a tous rêvé de cette maison.
Et nos enfants arrivés par adoption, de quelle maison rêvent-ils ? De quelle famille s’imaginent-ils faire partie ? Quel avenir leur prépare-t-on ?
À coups de rapports, d’études et de déclarations d’intention, quelle vie imagine-t-on pour eux ? Quels engagements prend-on en leur nom ? Depuis 2008, on a vu fleurir, à la suite du rapport Colombani, des rapports sur le délaissement parental, sur l’adoption et son évolution, sur le suivi des pupilles de l’État, sur l’accouchement sous X et son accompagnement, sur le déploiement de l’Agence française de l’adoption.
De ces rapports, émergent, tels des poupées russes, des groupes de travail et des missions en tout genre, explorant à leur tour, le délaissement parental, l’adoption et son évolution, l’accouchement sous X et son accompagnement, apportant leur lot de préconisations et de propositions, faisant fi au passage de toute la réflexion de nos prédécesseurs. Comme s’il fallait tout réinventer, et du passé, nécessairement faire table rase.
Un rapport en chasse un autre, sans que l’on se préoccupe d’une mise en œuvre concrète. Et pendant ce temps, les enfants grandissent ; nombre d’entre eux attendent que nous ayons fini de réfléchir pour enfin agir en leur faveur. L’avenir des enfants ne peut pas être un avenir de papier.
Il ne suffit pas d’affirmer au fil des rapports que la préparation et l’accompagnement des futurs parents et des enfants sont des éléments fondamentaux dans le processus d’adoption, encore faut-il se remonter les manches et faire le nécessaire.
Il ne suffit pas d’affirmer que les consultations d’orientation et de conseils en adoption font un travail essentiel pour les enfants et leurs familles, encore faut-il leur apporter une reconnaissance autre que celle de papier.
Il ne suffit pas d’encourager l’action des organismes spécialisés dans l’adoption des enfants pupilles dits à particularité, encore faut-il leur en donner les moyens.
Ce n’est pas d’une vie de papier dont ont besoin les enfants, mais d’une vie à vivre ! Il y a un temps pour la réflexion et un pour l’action. Aujourd’hui, il est temps d’agir.
Geneviève Miral Présidente d’Enfance & Familles d’Adoption Membre du Conseil supérieur de l’adoption
* Françoise Mallet-Joris, La maison de papier, Le Livre de Poche, 1972.
Dossier
Agrément et accompagnement Jean Gabriel Cosculluela, Danielle Housset, Aubeline Vinay, Françoise Toletti
Si on compare les chiffres des agréments en cours de validité (au 31 décembre 2009, 26 600 agréments dont 6 024 accordés en 2009), et ceux des adoptions (3862 en 2009), on constate mathématiquement qu’il est délivré trop d’agréments. Pour autant, si on regarde l’adoption comme une réponse aux enfants privés de famille, et non selon une vision adultocentrique, on perçoit immédiatement que surseoir à de nouvelles délivrances d’agréments ou imposer des quotas ne permettrait sans doute guère mieux qu’aujourd’hui de proposer les parents qu’ils attendent aux enfants dont les besoins, pour avoir changé dans la dernière décennie, sont encore mal connus ou du moins mal explicités. En replaçant l’enfant au coeur de toute démarche, on fait de l’adoption une aventure parentale et filiale. Ce numéro n’éclaire que la préparation des parents : il appelle naturellement une suite concernant celle des enfants et les questions, qu’adoptés, ils se posent.
Témoignage: « Temps de préparation, de réflexion, de partage et de rencontres » Claire
Voilà les mots qui conviennent parfaitement à l’expérience qui m’a amenée vers mes enfants. Projet de fonder la famille par filiation adoptive, le projet qui engage toute une vie. S’il est vrai que ce projet se concrétise à l’arrivée des enfants, tout ce qui précède est capital.
Témoignage: « Le grand plongeon » Véronique
Avant l’arrivée de ma fille, je vous aurais dit que j’étais très au point, que j’étais prête pour l’adoption. Puis, elle est arrivée, pupille de l’État, et là : un grand plongeon dans la dépression post-adoption.
L’agrément français : un passeport sans visa Danielle Housset
Passage obligé et premier pas vers l’enfant, l’agrément délivré par les présidents des Conseils généraux pour adopter un pupille de l’État ou un enfant étranger de moins de 15 ans a très peu changé depuis 1985. Passeport nécessaire, il ne permet guère, aujourd’hui, les apparentements délicats que sont en droit d’attendre les enfants.
L’agrément : un voyage entre houle et plénitude Aubeline Vinay
L’agrément est un voyage, c’est une partie du trajet adoptif qui s’effectue avec l’accompagnement et l’évaluation de partenaires sociaux. On pourrait comparer l’agrément à un processus, car la définition du terme processus indique un changement, une évolution, le passage d’un état à un autre.
Pourquoi choisir l’adoption comme mode de filiation ? Elisabeth Achard
Loin d’être une formalité, la procédure d’agrément consiste, pour les professionnels de l’adoption dans le cadre d’une évaluation, à accompagner les candidats dans ce cheminement psychique qui peut commencer parfois au dépôt de la demande pour se terminer à la rencontre de l’enfant, étape de confrontation avec la réalité.
Entretien avec Béatrice Faca, travailleuse sociale, chargée des entretiens en vue d’agrément. Propos recueillis par Aubeline Vinay
« Le projet d’adoption s’étend au-delà de l’agrément, jusqu’à l’adoption et même après car nous parlerons de l’accompagnement. Même s’il y a une évaluation, c’est bien un cheminement… Notre but n’est pas de soutenir une démarche mais d’accompagner la réflexion et l’évolution du projet. Le rôle du travailleur social est de faire avancer les candidats dans leur réflexion.»
À propos des entretiens avec le psychiatre Bernard Geberowicz
Psychiatre à Paris, le Dr Geberowicz reçoit régulièrement des couples ou des personnes seules, dans le cadre d’une demande d’obtention d’un agrément en vue de l’adoption d’un enfant. Ces entretiens font souvent peur aux postulants, puisse cet article les rassurer, tant l’humanité, et l’humour qui permet de dédramatiser, sont au rendez-vous.
Pourquoi se préparer ? Un « voyage » vers l’adoption Laurence Morel
Pourquoi se préparer à adopter un enfant, alors qu’on ne demande rien à ceux qui veulent en faire un ? Pourquoi exiger un agrément, si ce n’est pour mettre des bâtons dans les roues à des personnes désireuses de donner de l’amour à des enfants qui en manquent ? À EFA, nous entendons régulièrement ces questions qui restent parfois en « travers de la gorge » des candidats à l’adoption, surtout lorsque les entretiens en vue d’agrément sont vécus difficilement – et que l’agrément s’apparente à un parcours du combattant.
Du côté des associations départementales
La plupart des services départementaux informent les demandeurs d’agrément des différentes manifestations organisées par EFA, tant est admise la nécessité de rencontrer d’autres familles réunies par l’adoption. Les pratiques sont néanmoins très diverses d’un département à l’autre. Sans être exhaustifs, nous souhaitons montrer ici que les actions complémentaires peuvent aussi être communes, chacun apportant sa compétence au service des futurs parents et des enfants qu’ils adopteront.
Quand les associations interviennent aux côtés de l’ASE dans les réunions d’information sur l’adoption Françoise Toletti
En septembre 2008, la responsable de l’unité adoption du Conseil général de Savoie conviait EFA à une matinée d’échange sur la mission de notre association dans le cadre de la procédure d’adoption. Elle nous proposait, entre autres sujets, un partenariat lors des réunions d’informations préalables à la confirmation de la demande d’agrément. La volonté était double : remettre l’enfant au cœur du processus, faire entendre une autre voix que celle des travailleurs sociaux et psychologues par ailleurs évaluateurs, pour rendre le discours crédible.
Du bonheur empêché à la réalité des possibles Françoise Toletti
Peut-on attendre 10 ou 15 ans pour avoir enfin le bonheur d’être parents, le bonheur de voir sa famille rêvée enfin constituée ? C’est pourtant ce que nous promet aujourd’hui l’Agence française de l’adoption avec, par exemple, une liste d’attente pour le Vietnam complète pour les 30 ans à venir. C’est aussi ce que nous disent intuitivement, les chiffres de l’agrément : en 2010, pour le seul département de la Savoie, sur 35 agréments accordés, dix sont des renouvèlements, le premier n’ayant pas abouti.
« 0- 4 ans » : MAL DIT ! 0 pointé Danielle Housset
Sur la formulation de l’âge des enfants pour l’agrément.
Les Attentes qualitatives des pays d’origine L’équipe Adoption internationale d’EFA
Près de 20 ans après la définition de la Convention de La Haye (CdLH) en matière d’adoption internationale, les politiques de protection de l’enfance dans les pays d’origine évoluent, se structurent, et les services se professionnalisent. Autant les pays d’accueil ont le devoir de vérifier l’aptitude des candidats, autant les pays d’origine peuvent légitimement être exigeants lors des apparentements. Au-delà des conditions légales imposées par leurs lois respectives, la pression des pays d’accueil mais surtout les caractéristiques des enfants confiés à l’adoption poussent souvent les autorités de ces pays à rechercher des qualités spécifiques chez les futurs parents. Ceci est particulièrement vrai dans les pays qui ont ratifié la CdLH et qui, de ce fait, ont réfléchi à une réelle politique de protection de l’enfance. Illustration à travers trois exemples.
Au-delà de l’agrément : préparation et accompagnement – L’expérience italienne Geneviève Miral, Françoise Toletti
L’agrément fait partie d’un parcours global et ne représente pas, à lui seul, une fin en soi. Il doit s’intégrer dans tout un cheminement de préparation à l’enfant réel qui attend une famille. L’augmentation constante des adoptions internationales en Italie depuis la signature de la convention de La Haye procède d’un changement de regard global, tant sur le fonctionnement du système et des acteurs que sur la préparation et l’accompagnement des familles tout au long de leur parcours. Ces étapes, inscrites dans la loi, revêtent une importance cruciale au regard de l’âge moyen des enfants adoptés par les familles italiennes (6 ans en 2010).
L’évaluation psychosociale au Québec Claire-Marie Gagnon
Pour comprendre le fonctionnement des institutions québécoises en matière d’adoption, il faut d’abord resituer le Québec dans son contexte historique et social.
L’évaluation psychosociale au Québec Claire-Marie Gagnon
Pour comprendre le fonctionnement des institutions québécoises en matière d’adoption, il faut d’abord resituer le Québec dans son contexte historique et social.
Un permis de conduire spécial Silvia Carboni
En 2009, Sœur Silvia Carboni, psychologue, pédagogue et responsable d’un OAA italien publiait dans la revue Minori Giustizia un article intitulé « Un permis de conduire spécial pour l’adoption internationale ». Extraits.
Bibliographie
Rubriques
CHRONIQUE JURIDIQUE : Fallait-il ouvrir grande la boite de Pandore ? (À propos de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 26 janvier 2011)
C’EST-À-DIRE ! : Haïti signe la convention de La Haye, faut-il s’en réjouir ?
EN FRANCE : Accouchement sous X : quelles perspectives ?
ADOPTION INTERNATIONALE : EFA en Éthiopie
NOS ENFANTS À L’ÉCOLE : Une rubrique proche de vos préoccupations
SANTÉ : Les hépatites A et C
ENFANTS EN RECHERCHE DE FAMILLE : Un couple nous décrit son cheminement vers un enfant à particularité
DU CÔTÉ D’EFA : Soirée cinéma : Retour en Ethiopie
PAROLE D’ADOPTÉS : Adoption, blessures secrètes
LIRE – ÉCOUTER – VOIR : avec, entre autres, « Un hippocampe dans mon coeur » de Kim Ryeo–Ryeong, « Le rire de Sarah, une femme face à la stérilité » de Catherine Borella, et « L’enfant adopté en difficulté d’apprentissage – Guide d’accompagnement pour les parents adoptifs et les parents d’accueil » de Marie-Josée Lambert.