Haïti: ne pas confondre humanitaire et adoption

01/03/10 – Un espoir pour les enfants de Haïti (Time Magazine, 8 mars 2010)
Un reportage dans les pas d’une bénévole, une thérapeute haïtienne, qui participe au programme de l’UNICEF, de Save The Children et d’autres ONG: ce programme vise à recenser les enfants orphelins ou séparés de leurs parents et à retrouver des membres de leur famille élargie qui puisse les prendre en charge: enquête, accompagnement des enfants, dont la mémoire est affectée par le traumatisme subi, vérifications sur le terrain, soutien aux familles.


04/02/10 – Haïti: les dix Américains inculpés, l’Unicef lance un cri d’alarme

L’Unicef a estimé que le séisme du 12 janvier avait provoqué “la plus grave crise de protection des enfants jamais vue” en raison du grand nombre d’orphelins et d’enfants séparés de leurs parents. “Les risques de traite des enfants, d’enfants vendus dans des conditions proches de l’esclavage ou d’adoption illégale sont significatifs”, a déclaré la directrice générale adjointe du Fonds des Nations unies pour l’enfance, Hilde Johnson. Près de 40% de la population haïtienne a moins de 14 ans.

03/02/10 – Ces enfants enlevés par des baptistes (Le Temps)
Un reportage dans Le Temps (Suisse). Jean-Louis Le Touzet, envoyé spécial à Port-au-Prince, est allé à la rencontre des familles du lieu-dit La Calebasse. Là-haut, à 1000m d’altitude, personne ne vient jamais (“le monde nous a oubliés”) mais, ce jour-là, des baptistes sont venus trouver les parents et leur promettre un “avenir de lait et de miel” pour leurs enfants, “avec des livres, beaucoup de livres, des enfants sages, de quoi manger, et de bons professeurs qui vont leur apprendre les langues pour trouver un bon métier”. Témoignages de parents qui ont voulu croire en un avenir meilleur pour leurs enfants, mais auxquels on n’a laissé aucune adresse de destination quand le minibus est reparti avec une vingtaine d’enfants…

31/01/10 – Arrestation (30 janvier 2010) d’un groupe d’Américains qui auraient tenté d’enlever une trentaine d’enfants (TF1)
Un groupe d’Américains a apparemment tenté d’enlever ces 33 enfants à la faveur du chaos qui règne dans le pays depuis le séisme. Une organisation caritative assure que ces enfants ont encore de la famille. Selon la directrice du centre qui héberge les enfants: “En parlant avec des enfants plus grands, âgés de plus de sept ans, nous avons appris que leurs parents sont en vie. Certains nous ont donné des adresses et des numéros de téléphone”.

26/01/10 – Attention au phénomène “Arche de Zoé” (Le Monde)
Rony Brauman, cofondateur et ancien président de Médecins sans Frontières: “Dans des situations de catastrophe où beaucoup d’étrangers sont présents, des rumeurs de trafic et d’enlèvements d’enfants se développent, pas toujours à tort. Il faut mettre en garde les ONG et les personnes qui feraient preuve d’une ardeur adoptante un peu trop forte, leur dire que ce n’est pas le moment”. Il aprouve l’accéléraation des dossiers d’adoption en cours, mais invite à plus de retenue: “Caméra dans l’avion, madame la présidente [Carla Bruni] à l’arrivée : on en fait beaucoup trop. En ces temps de catastrophe, un peu de décence et de retenue ne sont pas de mauvais conseil.”

23/01/10 – Mises en garde contre des évacuations hâtives  (Le Point)

Plusieurs gouvernements ont annoncé des mesures pour accélérer les procédures d’adoption afin de permettre aux orphelins concernés d’être mis hors de danger. Ces annonces ont créé un début de polémique.

Des ONG comme Save the Children ou World Vision craignent que, dans la précipitation, l’accélération des procédures ne brise des familles et déraciner des enfants.

Parallèlement, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) a annoncé vendredi qu’une quinzaine d’enfants avaient disparu d’hôpitaux après le séisme. Jacques Boyer, délégué adjoint de l’Unicef en Haïti, a évoqué sur RTL “un cas assez important” jeudi à l’aéroport de Port-au-Prince, où “une ONG américaine s’apprêtait à faire quitter le territoire à des enfants en très bas âge, entre zéro et un an”.

22/01/10 – Enfants disparus en Haïti (Libération)
L’Unicef affirme que quinze jeunes Haïtiens ont disparu des hôpitaux, alertant sur une possible traite des enfants.

21/01/10 – L’ONG Save the Children, présente en Haïti, souhaite que les enfants dont les procédures d’adoption étaient finalisées puissent rejoindre leurs parents. Elle demande que de nouvelles procédures d’adoption pour des enfants affectés par le séisme ne soient pas engagées et souhaite que la reprise des adoptions internationales ne soit envisagée que bien ultérieurement. La priorité est de prendre soin des enfants, de les soigner et les protéger, tout en leur permettant la possibilité de retrouver des membres de leur famille – ce qui prend du temps. Dans le cas contraire, il sera possible d’envisager leur adoptabilité au cas par cas.


20/01/20 – Séisme en Haïti et adoption internationale:
extraits de la note d’information et communiqué de presse de la conférence de La Haye de droit international privé
Dans un contexte de désastre, tel que celui résultant du séisme, les efforts pour réunir un enfant déplacé avec son ou ses parents, ou des membres de sa famille, doivent être prioritaires. Toute tentative prématurée et non régulée visant à organiser l’adoption d’un enfant à l’étranger devrait être évitée.
Dans le cas où une adoption a été menée à terme par un tribunal haïtien et que toutes les précautions ont été appliquées, mais où certaines démarches administratives (par exemple ayant trait aux documents permettant à l’enfant de voyager) n’auraient pas été terminées, l’accélération du transfert de l’enfant vers le pays où il est appelé à vivre avec ses parents adoptifs peut se justifier. Il est indispensable de vérifier l’identité de l’enfant avant son départ.
Un désastre humanitaire tel que le séisme ne devrait pas être l’occasion de contourner des mesures de précautions indispensables dans le cadre d’adoptions sécurisées.
De telles précautions visent à éviter une situation où l’enfant serait placé auprès de parents adoptifs potentiels, et où le processus de nouage de liens et d’intégration commencerait, mais auquel il devrait être mis fin parce que des obstacles juridiques ou de irrégularités seraient apparues, avec risque de séquelles pour l’enfant et source de souffrance pour les parents adoptifs potentiels.
Ces considérations s’appliquent aussi à toute situation d’urgence. En effet, dans des situations où les services de prise en charge et de protection de l’enfance se sont effondrées, comme en Haïti, les risques d’adoptions insécurisées sont encore plus importants. C’est pourquoi, dans des contextes aussi tragiques, l’accent devrait être mis sur la protection de l’enfance plutôt que l’adoption.


19/01/10 –
Alors que les demandes de renseignements pour l’adoption d’enfants haïtiens explosent en Suisse depuis le séisme du 12 janvier 2010, les spécialistes de l’adoption, dont Terre des Hommes, soulignent que les conditions ne sont pas réunies pour pouvoir engager de nouvelles démarches d’adoption. Voir 20minutes.ch

18/01/10 – Le Service social international (SSI) rappelle quelques principes priorité aux opération en cours pour répondre aux besoins du plus grand nombre. Pour les adoptions engagées, ayant débouché sur un jugement d’adoption: réunir les garanties nécessaires sur l’identification des enfants et la vérification des éléments des dossiers, réévaluer l’adoptabilité psychosociale des enfants. Pour les autres enfants: n’entreprendre aucune démarche. Tout cela nécessite du temps, la priorité doit être donnée au regroupement des enfants avec d’autres enfants ou adultes qu’ils connaissent, aussi près de leur milieu de vie habituel que possible. Le SSI souligne le stress intense des enfants et le traumatisme additionnel d’une évacuation vers un nouveau pays. “L’évacuation de ces enfants ou leur placement temporaire dans des familles à l’étranger sont traumatisants. Il s’agit d’un bouleversement qui s’ajoute aux traumatismes que subit déjà l’enfant.” Enfin, le SSI appelle les pays d’accueil à oeuvre avec les ONG et l’ONU dans la recherche d’une approche commune pour “éviter les décisions contradictoires et les initiatives malheureuses”. Il invite “les différents acteurs de l’adoption internationale à faire preuve de retenue et de réflexion dans la gestion de la crise en cours, et d’éviter de donner des réponses émotionnelles à une question aussi délicate que l’adoption internationale de ces enfants”.

 

18/01/10 – L’Unicef appelle à “ne pas se précipiter” pour l’adoption d’enfants haïtiens (Sud-Ouest et France Info): “La position de l’Unicef, c’est de dire pas de précipitation: on est dans une phase de réponse à une urgence qui est absolument catastrophique et qui a déstabilisé, destructuré toutes les autorités du pays”, a expliqué sa porte-parole Bénédicte Jeannerod. “Prenons le temps – même si c’est extrêmement difficile pour les familles qui sont en attente – d’avoir une meilleure vision de ce qui se passe pour ces enfants là-bas”.

Lors d’une catastrophe, l’élan et la générosité poussent souvent des personnes émues par les images de dénuement et d’enfants blessés ou isolés à se proposer en parents pour les enfants. Mais la détresse et l’urgence ne sont pas toujours bonnes conseillères. Et la solidarité n’est appelée à devoir se traduire par un projet familial. D’autres réponses sont possibles.
L’Autorité centrale québécoise (aussi dénommée Service de l’Adoption Internationale) a effectué une mise en garde contre l’adoption comme réponse à une catastrophe en rappelant « qu’il adhère aux lignes directrices établies par la communauté internationale quant à l’aide devant être fournie aux enfants en cas de catastrophe naturelle. Ces règles prévoient, notamment, qu’avant de penser à la solution qu’est l’adoption internationale, il faut tout mettre en œuvre pour retrouver les familles des enfants qui en ont été séparés. L’expérience démontre, qu’après une catastrophe naturelle, il se passe des mois, sinon une année ou deux, avant que la situation de chaque enfant soit parfaitement clarifiée. Bon nombre d’entre eux retrouvent leurs parents ou, encore, sont pris en charge par leur famille élargie ou leur communauté ».

Enfance & Familles d’Adoption rappelle que l’adoption est un projet familial, une réponse au cas par cas pour un enfant adoptable, privé de famille. Un projet d’adoption touche les individus au plus intime d’entre eux et ne saurait se mener dans l’urgence sous le coup d’une émotion liée à un événement exceptionnel. Il ne faut pas confondre adoption et démarche humanitaire.

Avant toute décision concernant le sort d’enfants isolés dans le cadre d’une catastrophe, des précautions et des investigations s’imposent afin de s’assurer qu’ils sont effectivement orphelins et sans aucune possibilité de trouver une solution dans leur environnement et dans leur pays. Cela peut prendre des mois. À ce moment-là seulement, l’adoption internationale pourra être envisagée, pour autant que les pays concernés y soient favorables. L’expérience a montré, par exemple dans le cadre du génocide du Rwanda, que les enfants peuvent être les premières victimes de solutions par trop hâtives.

Il y a cinq ans, suite au tsunami en Asie du Sud-Est, Enfance & Familles avait également préconisé la prudence.

L’action humanitaire (comme l’adoption), doit se dérouler dans un cadre professionnel et légal: Enfance & Familles d’Adoption le rappelait pour le Darfour.