Edito
Éditorial : Protéger l’intimité de son enfant : une responsabilité de parents. Article de Geneviève Miras.
Protéger l’intimité de son enfant : une responsabilité de parent
Nos enfants sont nos enfants et nous sommes leurs parents, cela ne fait aucun doute, mais ils ne nous appartiennent pas. Être parent au quotidien, c’est aussi respecter et faire respecter l’histoire, l’identité, l’intimité, voire l’intégrité de son enfant.
Nous avons tous, parents adoptifs, affaire ou eu affaire au regard posé sur nos enfants, sur notre famille, sur l’essence même de nos liens. Ce regard, insistant parfois, indélicat régulièrement, intrusif souvent, pourrait nous laisser penser que nous en sommes uniquement les « victimes », que nous ne faisons que le subir.
Nos enfants deviendraient-ils en même temps qu’adoptés des enfants publics ? Enfants réputés de personne, donc de tous, enfants que chacun pourrait imaginer s’approprier ? Des enfants dont l’adoption pourrait laisser supposer, parce que l’absence de lien biologique est souvent visible, que leur histoire et leur parcours ne relèvent plus de la sphère intime. Que faisons-nous, parents, pour protéger leur intimité, pour défendre le respect – que nous leur devons – de leur histoire personnelle ?
Prenons garde à ne pas surexposer nos enfants
es « autres » qui nous agacent tant, dont nous vilipendons souvent la curiosité, le manque de correction, de pudeur, quelle place leur faisons-nous ? Quelles réponses leur donnons-nous ? Si entre humour (position souvent salvatrice), pédagogie pour « les jours avec » et colère pour « les jours sans », il nous faut souvent jongler, c’est encore plus vrai pour nos enfants. Si nous, parents, avons fait nos choix d’adultes responsables, si nous nous y sommes un tant soit peu préparés, nos enfants, eux, subissent plus, et plus souvent que nous, ces regards curieux, inquisiteurs, sans toujours savoir ou pouvoir s’en préserver.
Il nous incombe, comme à tout parent, de les préparer, de leur donner un certain nombre de clés pour savoir se protéger, de leur permettre de grandir en toute quiétude ; mais plus encore, nous devons les respecter en évitant de dévoiler leur histoire à l’extérieur, parce qu’il en va de leur libre arbitre, de leur confiance en nous et en l’avenir, et de notre responsabilité de parents.
Soyons transparents avec nos enfants, témoignons de l’adoption et de ses réalités, de sa place dans la société, revendiquons la légitimité de nos liens, mais prenons garde à ne pas (sur)exposer nos enfants en donnant à nos amis, à nos proches, de façon plus large à des inconnus en questionnement (pas toujours malveillants mais simplement curieux ou intéressés) ou via des blogs, très en vogue actuellement, des éléments intimes et personnels qui n’appartiennent qu’à nos enfants.
Nombreux sont les adoptés, adultes, qui nous rappellent que cette histoire, la leur, si nous devons leur en livrer tous les éléments dont nous disposons, n’a pas à être diffusée en dehors du cercle familial et qu’eux seuls décideront quand, comment, et à qui en parler.
Osons la pudeur. Sachons rester discrets face aux autres, pas dans le but de cultiver un hypothétique secret sur les origines et l’adoption de nos enfants, mais pour les préserver de la tentation, largement répandue, de les considérer comme des enfants publics.
Geneviève Miral
Présidente d’Enfance & Familles d’Adoption
Membre du Conseil supérieur de l’adoption