Adoption plénière, adoption simple (France)

Depuis la loi du 11 juillet 1966 (articles 343 à 370-2 du Code civil)(1), il existe en France deux sortes d’adoption: l’adoption plénière et l’adoption simple.
C’est l’adoption plénière qui est considérée comme l’adoption “de droit commun”. L’adoption simple est largement réglementée par renvoi aux règles applicables à la première. La dualité permet une adaptation à la diversité des situations de fait.

Adoption plénière

(Code civil, articles 343 à 359) (1)

1- Conditions de l’adoption plénière

Les conditions relatives à l’adoptant sont extrêmement légères. Elle peut être demandée :

  • L’adoption peut être demandée par un couple marié non séparé de corps, deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité ou deux concubins.
    Les adoptants doivent être en mesure d’apporter la preuve d’une communauté de vie d’au moins un an ou être âgés l’un et l’autre de plus de vingt-six ans (C. civ., art. 343).
  • L’adoption peut également être demandée par une personne âgée de plus de 26 ans (C. civ., art. 343-1).
  • La présence d’un ou plusieurs descendants n’est pas un obstacle de principe. Le tribunal vérifiera seulement « si l’adoption n’est pas de nature à compromettre la vie familiale ».

Attention : L’adoptant n’est autorisé à adopter ni ses descendants en ligne directe (enfants, petits-enfants) ni ses frères et sœurs, sauf motifs graves que l’intérêt de l’adopté commande de prendre en considération (C. civ., art. 346).

Les conditions relatives à l’adopté sont beaucoup plus strictes. Il faut en effet qu’aucun enfant ne puisse être « arraché » à sa famille de naissance pour être « transféré » à une autre, et c’est son intérêt qui doit avant tout être pris en considération.
Pour être adoptable plénièrement, un enfant doit en principe :

  • Avoir moins de quinze ans (jusqu’à vingt et un ans dans des cas particuliers et notamment concernant les pupilles de l’Etat) (C. civ., art. 345).
  • Avoir consenti personnellement à son adoption s’il a plus de treize ans. Il peut rétracter son consentement jusqu’au prononcé de l’adoption.

En outre, il doit se trouver dans l’une des situations suivantes :

  • Ses père et mère, ou à défaut le conseil de famille constitué pour lui dans le cadre de la tutelle de droit commun, ont consenti valablement à son adoption devant une autorité qualifiée (notaire, ASE, agent consulaire ou diplomatique français) et le délai de deux mois, prévus par la loi pour rétracter ce consentement, est expiré ;
  • Il est admis « définitivement » en qualité de pupille de l’État (sur l’admission en cette qualité, voir Code de l’Action sociale et des familles (CASF), art. L. 224-4 à L. 224-8)(1) et le conseil de famille des pupilles de l’Etat a consenti à son adoption ;
  • Il a été judiciairement déclaré délaissé par ses parents en application des articles 381-1 et 381-2 du Code civil par le tribunal Judiciaire, mais dans ce cas, il est généralement admis en qualité de pupille de l’État, et c’est en cette qualité qu’un projet d’adoption est fait pour lui.

Attention ! Sauf si l’enfant est parent ou allié de l’adoptant jusqu’au sixième degré, il doit être pupille de l’État lorsqu’il a moins de deux ans. Il s’agit d’éviter les accords directs entre familles et donc le trafic de nouveaux-nés.

Quelques conditions sont communes à l’adoptant et à l’adopté :

  • La différence d’âge entre eux doit, sauf exceptions, être de quinze ans au moins ;
  • L’enfant doit avoir été accueilli au moins six mois au foyer de l’adoptant (le plus souvent il l’aura été dans le cadre d’un placement en vue de l’adoption décidé par le conseil de famille des pupilles de l’État).

2- Procédure de l’adoption plénière

En amont de la procédure d’adoption proprement dite, qui est judiciaire, des règles administratives s’appliquent à l’adoption des enfants pupilles de l’État:

  • Les candidats doivent détenir un agrément délivré par le président du conseil départemental du lieu de leur résidence. Sur l’agrément, voir les textes officiels / textes relatifs à l’agrément(1);
  • Sauf justes motifs, l’adoptant ou le plus jeune d’entre eux doit avoir au maximum cinquante ans de plus que le pupille qu’il se propose d’adopter, ou, le cas échéant, du plus jeune d’entre eux (CASF, art. L. 225-2).
  • L’enfant fait l’objet d’un placement en vue de son adoption, qui constitue le recueil de six mois nécessaire au prononcé de l’adoption (CASF, art. L. 225-1)
  • Le tribunal à saisir est celui du lieu où demeure l’adoptant s’il demeure en France (sinon, voir C. pr. civ., article 1166)(1);
  • Le tribunal demande l’avis des descendants de l’adoptant, s’il en a, de façon informelle.

Attention ! À partir du placement de l’enfant en vue de son adoption, la famille d’origine ne peut plus ni demander la restitution de l’enfant ni établir une filiation (art 352 c.civ).

La procédure d’adoption proprement dite est judiciaire, et  « gracieuse », (articles 1166 à 1176 du Code de procédure civile (CPCiv.)(1); le tribunal judicaire a pour mission de vérifier que les conditions de l’adoption sont remplies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant.

  • La famille d’origine n’est pas partie à cette procédure, sauf en cas de « tierce opposition » à l’encontre du jugement en cas de fraude ou de dol imputable à l’adoptant (et non à l’intermédiaire);
  • La requête d’adoption, déposée par le ou les adoptants, peut être présentée sans avocat si le mineur a été recueilli au domicile des adoptants avant ses 15 ans, au procureur de la République qui doit la transmettre au tribunal ;
  • Le ministère public (procureur de la République) donne son avis ;
  • Les débats, s’il y en a, ont lieu à huis clos, « en chambre du conseil » ;
  • L’enfant, capable de discernement est entendu au cours de la procédure selon les modalités définies à l’article 353 du Code civil ;
  • Avec l’accord de l’adoptant, le tribunal peut prononcer une adoption simple s’il refuse de prononcer une adoption plénière ;
  • Le ou les prénoms de l’enfant peuvent être modifiés à l’occasion de la procédure ; Le mineur de plus de 13 ans doit y consentir.
  • Si l’adoption est prononcée, le jugement n’est pas motivé ; en revanche, il l’est si l’adoption n’est pas prononcée ;
  • Le jugement est susceptible d’appel devant la cour d’appel, et au-delà de pourvoi en cassation (en cas de prononcé de l’adoption, le ministère public peut faire appel puis se pourvoir en cassation).

3- Effets de l’adoption plénière

Une fois prononcée, l’adoption prend effet rétroactivement au jour du dépôt de la requête :

  • L’adopté entre dans la famille de l’adoptant où il acquiert exactement les mêmes droits et les mêmes devoirs qu’un enfant « biologique » dont la filiation est établie, y compris en matière d’empêchements à mariage. ; Il prend le nom du ou des adoptants selon les modalités prévues à l’art. 357 C. civ.
  • L’adopté se voit attribuer la nationalité française si l’un des adoptants est français, s’il ne l’avait pas, et est réputé être français depuis sa naissance (Code civil, article 20) ;
  • L’adoptant qui avait fait une donation à un tiers peut en demander en justice la révocation pour « survenance d’enfant » à condition que la révocation ait été prévue dans l’acte de donation (C. civ., art. 960).
  • L’adopté perd pour l’avenir tous liens juridiques avec sa famille d’origine sauf les empêchements à mariage.
  • L’adoption plénière est irrévocable (C. civ., art. 359). En cas d’échec, une adoption simple pourra être prononcée pour motifs graves au profit d’un autre adoptant ou couple d’adoptants (C. civ., art. 360)(1).

Afin que ce changement de filiation soit effectif,

  • L’acte de naissance originaire de l’adopté est revêtu de la mention « adoption » et annulé. Son contenu ne doit plus être divulgué, mais le procureur de la République continue à y avoir accès, notamment en cas de recherche de ses origines familiales par l’adopté ;
  • Le jugement est transcrit sur les registres de l’État civil du lieu de naissance de l’adopté et c’est cette transcription qui lui tient désormais lieu d’acte de naissance ;
  • La transcription fait état de l’adoption mais ne comporte aucune indication relative à la filiation d’origine de l’adopté ;

Attention ! Depuis la loi n°2002-93 du 22 janvier 2002, l’enfant né sous le secret dit « né sous X » peut éventuellement avoir accès à ses origines, par l’intermédiaire du Conseil national d’accès aux origines personnelles (CNAOP).

La Revue Accueil

Accueil est une revue trimestrielle réalisée par EFA. C’est la seule revue française consacrée à l’adoption. Accueil propose des témoignages d’adoptés et d’adoptants, des textes émanant de travailleurs sociaux, psychologues, psychanalystes, sociologues, juristes, écrivains.

Adoption simple

(Code civil, articles 360 à 370-2) (1)

Pour l’essentiel, l’adoption simple est traitée par renvoi aux règles de l’adoption plénière (Code civil, article 361). Elle obéit aux mêmes conditions et à la même procédure, sous quelques réserves importantes qui en font, avec ses effets, l’originalité.

1- Conditions spécifiques de l’adoption simple

  • L’adopté peut être majeur, auquel cas toutes les conditions le concernant sont remplacées par son consentement.

2- Spécificités de procédure de l’adoption simple

  • L’enfant est placé en vue d’adoption mais il n’y a pas de délai de recueil minimum avant le dépôt de la requête ;
  • Si la requête tend à une adoption plénière, le tribunal ne pourra prononcer une adoption simple qu’avec l’accord du requérant.

3- Effets de l’adoption simple

  • L’adopté conserve son nom d’origine, auquel est accolé celui de l’adoptant, sauf demande contraire. L’adopté majeur et l’adopté âgé de plus de 13 ans ne change de nom que s’il y consent. Sur la question du nom de l’adopté simple, particulièrement complexe, voir Code civil, article 363(1);
  • À l’occasion de son adoption, l’adopté peut changer de prénom sur demande de l’adoptant ; s’il a plus de 13 ans, il devra y consentir ;
  • L’adoption est mentionnée en marge de l’acte de naissance de l’adopté ;
  • Les liens de l’adopté avec sa famille d’origine ne sont pas rompus, notamment en matière héréditaire et alimentaire ;
  • L’adoptant est seul investi à l’égard de l’adopté mineur des droits d’autorité parentale, inclus celui de consentir au mariage de l’adopté (C. civ., art. 365) ;
  • Les liens créés avec l’adoptant sont identiques à ceux créés par l’adoption plénière, mais les liens avec les autres membres de la famille de l’adoptant sont atténués (pas de réserve dans la succession des ascendants de l’adoptant, empêchements à mariage susceptibles de dispense dans la famille adoptive (C. civ., art. 366);
  • L’adoption simple est prise en compte pour le paiement des droits de mutation lorsque l’adoption a lieu lors de la minorité de l’adopté. Si elle a lieu après sa majorité, certaines conditions doivent être remplies pour qu’il en soit ainsi (Code général des impôts, article 786) ;
  • En cas de décès de l’adopté sans postérité et sans conjoint, sa succession se partage entre ses deux familles ;
  • L’adoption est révocable, uniquement pour motif grave apprécié par le tribunal judicaire, et sur demande du procureur de la République durant la minorité de l’adopté, et à la demande de l’adoptant ou de l’adopté lorsque ce dernier est majeur ;
  • L’adoption simple peut être convertie en adoption plénière jusqu’aux vingt et un ans de l’adopté « si les conditions en sont remplies » : une fois majeur, le consentement de ses parents de naissance ne sera plus nécessaire pour cette conversion.

1) Textes pouvant être consultés sur le site www.legifrance.gouv.fr.

Page rédigée en collaboration avec Pascale Salvage, professeur honoraire de l’Université Grenoble-Alpes. Auteur de nombreux articles, elle signe le titre « La filiation par l’adoption » in Dalloz Action, Droit de la famille, 9e éd. 2023-2024.

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