Quel enfant adopter ?

Nourrisson ou déjà grand, qui nous ressemble ou tellement différent physiquement, en bonne santé ou malade, porteur d’un handicap ou non, un seul ou plusieurs enfants à la fois… Quand la famille adoptive s’élargit, elle est parfois bien loin du schéma « classique ». Et les parents doivent passer de l’enfant dont ils rêvent… à l’enfant qui les attend. Voici des pistes de réflexion et quelques éléments de réponse.

Vaut-il mieux adopter un tout-petit ?

Beaucoup de postulants à l’adoption rêvent d’adopter un tout-petit : « le plus jeune possible », « pas plus d’un an », entend-on. Il est légitime que de nombreux parents désirent « pouponner ». Ils craignent en adoptant un enfant déjà grand, avec un passé éventuellement lourd, de rencontrer trop de difficultés et de ne pas pouvoir l’élever selon leurs souhaits.

C’est méconnaître la réalité. D’abord, parce qu’un enfant, même petit, est déjà marqué par ce qu’il a déjà vécu : la vie intra utero, pendant laquelle il a peut-être manqué de soins, de nourriture, d’amour ; les conditions de l’accouchement et les jours ou les semaines qui ont suivi ; les conditions dans lesquelles la séparation d’avec ses parents de naissance a eu lieu ; l’absence d’affection et de stimulation dans certaines institutions … Un bébé de quelques mois peut s’avérer en plus grande difficulté psychologique qu’un enfant de 5 ans, par exemple, qui aurait bénéficié d’un bon maternage.

Ensuite, l’adoption concerne de moins en moins de bébés et de plus en plus d’enfants grands. En France, les Conseils de famille des pupilles de l’État ont peu de nourrissons à confier en adoption (actuellement moins de 400 par an, pour 9 300 titulaires d’un agrément). À l’étranger aussi, de moins en moins de bébés sont confiés à l’adoption. La situation de certains pays s’améliore : meilleur soutien des parents de naissance, adoption nationale en progression, recherche de solutions dans le pays lui-même…

Il convient donc que vous pensiez votre projet d’adoption en tenant compte des réalités.

Mais n’allez jamais au-delà de votre capacité personnelle d’accueil : vous devez être capable de refuser un apparentement qui ne correspondrait pas à votre projet, avec les conséquences que cela peut supposer. Vous seuls serez ses parents : ne vous fiez pas à ceux qui pourraient vous conseiller un projet qui ne vous correspond pas. L’enfant que l’on adopte doit être celui que l’on se sent la capacité d’accueillir.

Comment se passe l’adoption d’un enfant grand ?

Chaque année, en France, des enfants deviennent adoptables à un âge avancé (plus de 6 ans). Certains sont adoptés par leur famille d’accueil, mais un nombre significatif d’entre eux est placé en vue d’adoption auprès de personnes agréées à cet effet.

De même, à l’étranger, la plupart des enfants deviennent adoptables après l’âge de 6 ans et sont, eux aussi, en attente d’une famille.

L’expérience montre que l’adoption d’un enfant plus grand se passe bien dès que parents et enfant y ont été bien préparés. Un accompagnement de la famille, par un psychologue, un travailleur social ou au sein d’un groupe de parents, s’avère souvent souhaitable, tant pour l’enfant que pour les parents : chercher à se faire soutenir est tout aussi normal que se tourner vers un médecin quand on éprouve des inquiétudes sur la santé de son enfant.

Mais ce projet d’adoption d’un enfant grand doit être mûrement réfléchi et préparé par les futurs adoptants qui devront faire preuve de beaucoup de souplesse, d’ouverture d’esprit et de disponibilité. La rencontre avec des familles ayant vécu ce type d’adoption sera très bénéfique.

À lire :

Les besoins spéciaux des enfants « à particularité » (enfants grands, fratrie), Cahiers Psy n° 6, Agence française de l’adoption.

Puis-je choisir d’adopter un garçon ou une fille ?

Comme tous les parents, les parents adoptifs peuvent, avant l’arrivée de l’enfant, désirer qui un garçon, qui une fille et, éventuellement, en faire part aux travailleurs sociaux ou aux organismes avec lesquels ils sont en contact en vue d’une adoption.

Cependant, il s’agit simplement d’un souhait personnel qui, comme tous les autres, mérite d’être revisité pour ne pas enfermer son projet dans le rêve de l’enfant idéal.

Qu’implique le fait d’adopter un enfant de couleur ?

La question de l’ethnie de l’enfant est à envisager en priorité, que ce soit pour une adoption à l’étranger mais aussi pour une adoption en France, les enfants adoptables en France étant de toutes origines.

Si, dans un premier temps, de nombreux postulants rêvent d’un enfant qui leur ressemble, on constate souvent une évolution de leur part vers un enfant différent d’eux, au fur et à mesure qu’ils rencontrent des familles « multiraciales » : la solidité des liens affectifs témoigne que l’amour n’a pas de couleur.

Cette évolution varie selon la sensibilité personnelle de chacun.

Et les parents doivent pouvoir être suffisamment en accord avec eux-mêmes pour ne pas risquer d’attribuer les éventuelles difficultés auxquelles ils seront peut-être confrontés un jour à l’origine ethnique de leur enfant.

Il faut également se sentir prêt à affronter le regard des autres : adopter un enfant d’une origine différente de la sienne, c’est accepter de lire sans cesse, dans le regard des autres, que la famille que l’on constitue repose sur l’adoption. Ce peut être difficile à vivre pour soi-même. Ce peut être surtout difficile à vivre pour l’enfant concerné, voire pour ses frères et sœurs. Enfin, il faut se sentir prêt à faire face au problème du racisme dans un pays où la majeure partie de la population est blanche.

L’environnement social de la famille et le milieu dans lequel l’enfant va vivre vont être importants pour son intégration : c’est un élément qui peut peser lourd dans le projet d’adoption. Une famille pourra ainsi, selon son lieu et son mode de vie, renoncer à adopter un enfant maghrébin ou noir en raison de la xénophobie de son entourage… ou, au contraire, considérer cette présence comme positive et source d’ouverture à l’autre.

De nombreuses personnes adoptées témoignent aujourd’hui d’expériences de discrimination, qu’elles aient lieu à l’école, dans leur sphère amicale, familiale… et soulignent qu’elles ont avant tout besoin du soutien et de l’écoute de leurs parents.

« J’ai toujours eu conscience d’être différente – physiquement – de mes parents, mais c’est en allant à l’école que j’ai appris que ma couleur de peau était un problème. » Amandine Gay (Une poupée en chocolat, La Découverte, 2021)

« Un jour j’ai décidé de porter la coupe Afro. Vient alors une déferlante de réactions racistes. Je n’ai rien dit. Et le déni de ma famille et de mes amis. Je n’ai toujours rien dit. Aujourd’hui, j’ai décidé de ne plus me taire. » Néhémie Lemal (On ne peut plus rien dire, documentaire disponible sur YouTube)

Ces propos nous rappellent que les parents doivent pouvoir faire face aux violences et au racisme que subissent leurs enfants et être en mesure de les accompagner dans leur construction identitaire.

À lire, à voir, à entendre :

EFA en France

Trouvez l’association dans votre département

Il existe une association EFA dans chaque département, animée par des parents adoptifs qui ont une expérience des démarches d’adoption.
Renseignements sur les procédures, accompagnement dans la réflexion, écoute, contact avec des familles adoptantes. N'hésitez pas à la joindre et rejoindre.
 

Qu’appelle-t-on un enfant à besoins spécifiques ?

Dans le vocabulaire de l’adoption, un enfant grand et/ou avec un problème de santé, porteur de handicap, victime de violences physiques ou sexuelles, mais aussi des enfants en fratrie (frères et sœurs biologiques) sont qualifiés d’enfants « à besoins spécifiques ».

Le vocable recouvre donc des situations très différentes : de la question de l’âge au problème de santé, y compris, dans quelques cas, avec une hypothèque sur le pronostic vital, en passant par des maladies plus ou moins importantes ou des handicaps sensori-moteurs.

Si, en France, le « besoin spécifique » est en général bien défini quand il s’agit de problèmes de santé, de nombreux pays étrangers n’ont pas les moyens de fournir un dossier médical précis et étayé. 

À noter :

  • Les postulants prêts à adopter des enfants qui présentent des besoins spécifiques importants ont intérêt à déposer une demande dans plusieurs départements, et auprès de l’Agence française de l’adoption (AFA), dans le cadre du flux inversé.
  • Ils peuvent également s’adresser à ERF (Enfants en Recherche de Famille) : ce service d’EFA fait un travail essentiel pour ces enfants, en informant, en préparant et en accompagnant des candidats pour l’adoption d’enfants dits « à besoins spécifiques » ; en tenant à jour un fichier de parents potentiels et en proposant des familles aux différentes ASE (Aide sociale à l’enfance) qui sollicitent le service ERF pour un de ces enfants.

À lire :

Comment réfléchir à l’accueil d’un enfant malade ou handicapé ?

Adopter un enfant qui souffre d’une maladie ou présente un handicap nécessite une véritable réflexion. En effet, la famille devra tenir compte de ses capacités matérielles : la présence à proximité d’une école adéquate, pour l’enfant déficient, sourd ou mal voyant, par exemple ; la disposition de la maison s’il s’agit d’un enfant qui se déplace difficilement, etc. La famille devra également envisager les changements que cela peut entraîner dans son mode de vie (renoncer à certaines activités, déménager pour se rapprocher d’une structure spécialisée…), la réaction que pourront avoir les enfants déjà présents au foyer (qui peuvent accepter facilement l’idée, moins facilement la réalité), les réactions que cela pourra susciter dans l’entourage familial, amical … Et, dans tous les cas, les familles ne doivent pas avoir de scrupules à exprimer leurs limites dans les particularités qu’elles se sentent prêtes à assumer.

L’accueil d’un enfant malade ou handicapé doit se préparer avec soin ; là encore, il faut savoir reconnaître ses limites. Les postulants doivent se renseigner sur les pathologies et les handicaps qui peuvent se présenter, de façon à cerner précisément leur projet : ce n’est pas la même chose d’adopter un enfant malentendant et un enfant avec des incertitudes de développement ou porteur d’un handicap intellectuel. Et, pour chaque particularité, ils doivent s’interroger sur la manière dont ils envisagent leur vie avec un enfant présentant cette particularité… Il faut aussi avoir à l’esprit qu’une particularité peut en cacher une autre : il faut donc évaluer ses forces en envisageant le fait que cela puisse être plus grave qu’on ne vous l’aurait dit.

Les postulants peuvent se faire accompagner, dans l’élaboration de leur projet, par un médecin et/ou un psychologue, par les travailleurs sociaux, par le service ERF ( Enfants en Recherche de Famille), qui sauront les conseiller, mais aussi par des familles qui vivent une situation similaire (les réunions dans les associations EFA départementales sont une bonne occasion de rencontrer ces familles). 

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Peut-on adopter une fratrie ?

En France et dans le monde, des enfants sont proposés à l’adoption en « fratrie » : en règle générale, les enfants élevés ensemble ne sont pas séparés lors de leur adoption. Il faut donc leur trouver des familles prêtes à les accueillir en même temps, qu’ils soient deux, trois, parfois plus. Généralement, les enfants en fratrie sont des enfants grands.

Les familles qui ont tenté cette grande aventure ne le regrettent généralement pas : « Cela fait trois ans que notre bonheur a commencé, avec nos quatre enfants, qui étaient alors, pour les uns, encore petits, et pour les autres, déjà grands. Que de bonheur durant tout ce temps. Certaines personnes me demandent parfois ce que je ferais si c’était à refaire, avec quatre enfants d’un coup : du fond du cœur, je leur dis que je reprends l’avion demain matin à la première heure, pour aller les chercher de nouveau. »

Dans le cas d’une fratrie préexistante, la présence d’un frère ou d’une sœur peut être un élément de stabilité ou un facteur sécurisant pour chacun des enfants, surtout s’ils arrivent de l’étranger. Cela ne signifie pas que tous les enfants s’acclimateront au même rythme : l’un des enfants peut avoir besoin de plus de temps que son frère ou sa sœur pour s’intégrer à son nouvel environnement.

Différents types de difficultés peuvent surgir : les relations entre les frères et sœurs peuvent se resserrer ou, au contraire, se distendre ; ils peuvent aussi faire bloc face à leurs nouveaux parents ; parfois, un aîné refuse de lâcher son rôle de substitut parental et voit ses nouveaux parents comme des rivaux. Sans parler des difficultés liées à toute adoption, et des problèmes matériels !

Dans certains cas, des frères et sœurs sont adoptés séparément. S’ils en ont connaissance, les parents s’interrogeront alors sur l’opportunité d’informer leurs enfants de l’existence de frères ou sœurs parfois inconnus).

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Dernière mise à jour le 13 mars 2024