Rapport d’activité EFA pour 2018

Le mot de la présidente

Sans avoir encore les données officielles concernant les enfants pupilles de l’État en 2018 (disponibles en 2020), on constate déjà une augmentation significative de leur nombre due à un plus grand nombre de déclarations judiciaires de délaissement. La mise en place des commissions d’examen de la situation et du statut des enfants confiés (CESSEC) – rendue obligatoire par la loi sur la protection de l’enfant de 2016 – commence à produire ses effets alors même que tous les départements ne les ont pas encore créées.

Certains départements ont créé de nouveaux Conseils de famille. Il est désormais important que les départements se dotent des moyens nécessaires pour élaborer des projets de vie pérennes pour ces enfants.

Cette année, la scolarité s’est trouvée au cœur des préoccupations d’EFA. Dès l’annonce par le ministre de l’Éducation nationale d’un projet de loi qui rendrait l’instruction obligatoire dès l’âge de 3 ans, EFA lui a demandé un rendez-vous. En effet, il semblait primordial qu’un assouplissement puisse être prévu dans la loi pour les enfants adoptés. À leur arrivée, ces derniers ont avant tout besoin de temps pour « se poser » dans leur nouvelle famille et créer des liens d’attachement sécure avec leurs parents. Une intégration scolaire trop rapide après leur arrivée peut avoir des effets négatifs sur la construction des relations familiales et risque de mettre les enfants en difficulté dès leur première année d’école. EFA a été reçu en juillet par le ministère de l’Éducation nationale malheureusement sans suite positive. Suite à sa demande, EFA a ensuite été reçu à l’Élysée, malheureusement trop tard pour qu’une modification du projet de loi soit envisageable. N’ayant pu obtenir d’audition auprès de la commission chargée de ce projet, EFA a demandé à l’Union nationale des associations familiales (UNAF) de relayer sa demande et à la sénatrice de Loire-Atlantique, Madame Meunier, de poser une question au gouvernement. À la demande d’EFA, le Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) a également voté un avis allant dans ce sens lors de son assemblée plénière de décembre. En effet, au-delà des enfants adoptés, d’autres enfants en situation de vulnérabilité pourraient être concernés par cette mesure. Le projet de loi a été adopté début 2019 par l’Assemblée nationale sans que cet avis ni la demande d’EFA n’aient été pris en compte.

Comme lors des deux précédentes années, le projet de fusion entre l’Agence française de l’adoption (AFA) et le Groupement d’intérêt public de la protection de l’enfance (GIPED) a mobilisé les équipes d’EFA. Les choses se sont accélérées en fin d’année lorsque le gouvernement, à l’occasion du vote du projet de loi sur l’interdiction des violences ordinaires, a tenté de faire voter un amendement l’autorisant à effectuer le rapprochement des deux groupements d’intérêt public par voie d’ordonnance. Le gouvernement s’est trouvé dans l’obligation de retirer cet amendement sous la pression des députés, le vecteur législatif étant fortement contesté. Quelques jours après, l’abandon définitif du projet était annoncé. Si cette décision est satisfaisante – le projet de fusion faisant craindre des risques pour les procédures gérées par l’AFA (suspensions éventuelles pendant une durée indéterminée, voire arrêt définitif) –, nous ne pouvons que regretter les coûts et la mobilisation de personnel engagés dans ce projet. En effet, depuis trois ans, une partie du personnel de l’agence, dont ses directrices successives, ont consacré une partie de leur énergie à ce rapprochement. Espérons que, désormais, l’AFA pourra se recentrer sur sa mission première, à savoir l’adoption. Le CNPE auquel EFA participe activement (séances plénières et commissions adoption et formation continue) a poursuivi ses travaux de réflexions et a émis un certain nombre d’avis. Avis qui restent des « voeux pieux » sans une véritable volonté du gouvernement d’aboutir à des textes de lois qui seraient opposables aux intéressés. Il en est de même des moyens alloués au CNPE et leur absence nuit à son fonctionnement : difficile de préparer des dossiers alors que l’ordre du jour n’est envoyé que quelques jours avant les réunions, ou lorsque les avis soumis au vote sont découverts le jour même de la séance plénière.

Malgré plusieurs interpellations écrites et orales de la ministre des Solidarités et de la Santé afin que le CNPE se voit doté au moins d’un poste d’assistante, la situation n’évolue pas. La question de la protection de l’enfance reste malheureusement toujours dans l’angle mort des politiques, avec l’espoir que, peut-être, la nomination d’un secrétaire d’État en charge de la protection l’enfance permette enfin d’avancer concrètement. Que ce soit au niveau des institutions nationales ou départementales, EFA continue à oeuvrer pour que les familles bénéficient d’un meilleur accompagnement avant, pendant et après l’adoption ainsi que les adoptés en recherche de leurs origines. Et ce, malgré un contexte difficile : fermeture dans certains départements des services Adoption, perte de compétence en découlant… Si l’adoption reste une mesure de protection de l’enfance destinée à donner à des enfants qui n’en ont plus la famille la mieux à même de répondre à leurs besoins, dans le respect de leurs droits, il est de plus en plus urgent qu’une réforme de nos procédures intervienne pour améliorer la prise en charge des familles.

Nathalie Parent
Présidente d’Enfance & Familles d’Adoption
Membre du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles
Membre du Conseil national de la protection de l’enfance

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