Évacuation des enfants haïtiens en cours d’adoption par des Français

18 décembre 2010. La ministre des Affaires étrangères et européennes, Michèle Alliot-Marie, annonce que deux avions ont été affrétés pour “permettre aux familles françaises d’aller chercher en Haïti les enfants en cours d’adoption”. Les avions “quitteront Paris pour Port-au-Prince les 21 et 23 décembre prochain”.

L’épidémie de choléra qui sévit actuellement en Haïti a réactivé les angoisses des familles en attente et relancé les revendications d’évacuation urgente des enfants en cours d’adoption. En outre, le récent remaniement ministériel a aussi modifié la donne avec un changement d’interlocuteurs. Depuis plusieurs semaines, des informations incomplètes, non confirmées, circulaient sur l’évacuation des enfants en cours d’adoption. Ces informations, relayées aussi par la presse, ont suscité d’énormes espoirs pour les familles y compris celles pour lesquelles les procédures sont peu avancées.

La communication de la ministre du 18 décembre fait suite au communiqué officiel mis en ligne le 14 décembre 2010 sur le site de l’ambassade de France à Port-au-Prince, reprenant les conditions de l’accord passé avec le Premier ministre haïtien, M. Bellerive.

 

L’accord entre la France et Haïti

Le 11 décembre 2010, le Premier ministre haïtien a donné son accord pour que 285 de ces enfants puissent quitter le territoire avec un laissez-passer, à condition qu’un jugement ait été prononcé pour ces enfants ou a minima qu’ils aient fait l’objet d’un consentement et que l’IBESR ait autorisé leur adoption.

Alors que, le 11 décembre,  une part importante des enfants concernés par l’accord ne remplissait pas encore les conditions pour le départ, il semble que l’IBESR ait, dans les jours qui ont suivi, validé tous les dossiers en cours.

Le communiqué de la ministre déclare que “les démarches juridiques permettant l’adoption de 318 enfants haïtiens par des familles françaises sont aujourd’hui achevées”. 

Les conditions d’évacuation des enfants

Deux possibilités avaient été initialement envisagées: les parents se rendraient en Guadeloupe ou en Martinique pour retrouver leurs enfants OU à Port-au-Prince. Finalement, les familles feront un aller-retour grâce aux avions spécialement affrétés.

Personne ne peut dire, aujourd’hui, si la situation va se dégrader sur place dans les semaines qui viennent. Difficile donc de savoir s’il y a vraiment urgence à faire partir les enfants.

 

Les positions d’EFA

Les positions prises par EFA dès janvier 2010 sont toujours d’actualité concernant notamment la nécessité d’un statut juridique clair pour  les enfants évacués et l’indispensable concertation des différents ministères (ministère des Affaires étrangères et européennes, Famille, Santé, Intérieur et Justice) et organismes concernés (CAF, assurance maladie, etc.).

On ne peut que déplorer les retards pris dans ces négociations, cela aurait permis à un plus grand nombre d’enfants d’être arrivés aujourd’hui en respectant la légalité des procédures et en ayant rencontré leurs parents dans les meilleures conditions possibles.

Par ailleurs, il semble qu’aucun engagement n’ait été pris par les autorités haïtiennes concernant la poursuite des procédures pour les enfants sans jugement qui seraient évacués. Nous n’avons, à l’heure actuelle, aucune assurance que la situation des enfants sera régularisée ultérieurement au regard de leur pays d’origine.

Au moment où de nombreuses juridictions refusent d’accorder des adoptions plénières aux enfants pour qui un jugement a été prononcé en Haïti, EFA s’inquiète du futur statut de ces enfants, qui peut prendre des années à se sécuriser – situation qui peut être source d’incertitudes et de difficultés dans la vie quotidienne. EFA regrette que ses nombreuses alertes sur ce point auprès des autorités soient restées sans réponse.

Enfin, depuis janvier 2010, EFA réclame la réunion du comité interministériel de l’adoption. La concertation et la coordination des différents ministères et des organismes concernés sont indispensables pour que tout soit mis en place afin que les enfants arrivant en France et leurs parents puissent bénéficier de tous les droits attachés à l’adoption : congé d’adoption pour les parents, affiliation à la sécurité sociale, prestations de la CAF, documents permettant la circulation sur le territoire français et en dehors de celui-ci.

Cette fois encore, rien ne semble avoir été prévu pour prendre en compte au mieux l’intérêt des enfants et leur offrir les garanties nécessaires à leur protection maximale.