Loi du 21 février visant à réformer l’adoption et ordonnance du 5 octobre 2022 : où est la sécurisation du processus adoptif ?

Loi du 21 février visant à réformer l’adoption et ordonnance du 5 octobre 2022 : où est la sécurisation du processus adoptif ?

L’ordonnance n° 2022-1292 du 5 octobre 2022 a été prise en application de l’article 18 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l’adoption. Son but était de rendre visibles la valorisation de l’adoption simple voulue par le législateur et le particularisme de l’adoption de l’enfant du conjoint, partenaire de PACS ou concubin, en coordonnant les règles du code civil entre elles et en les harmonisant avec celles du code de l’action sociale et des familles. À cet effet, l’ordonnance restructure formellement l’ensemble du Livre I, titre VIII du code civil tel qu’issu de la loi du 21 février 2022, sans en changer le fond et modifie, à peine, le code de l’action sociale et des familles. Publiée le 6 octobre 2022 (Légifrance – Publications officielles – Journal officiel – JORF n° 0232 du 06/10/2022 – legifrance.gouv.fr ), l’ordonnance entrera en vigueur le 1er janvier 2023 et sera applicable aux instances introduites à compter de cette date.

Le titre VIII du livre Ier du code civil relatif à la filiation adoptive est désormais subdivisé en cinq chapitres (au lieu de trois auparavant) :

Ier : Des conditions requises pour l’adoption, plénière ou simple (relatives à l’adoptant, à l’adopté, aux rapports familiaux préexistants entre l’adoptant
et l’adopté, au consentement à l’adoption) ;
II : De la procédure et du jugement d’adoption (placement en vue de l’adoption plénière ou simple, agrément requis pour les pupilles de l’État, jugement) ;
III : Des effets de l’adoption (communs aux deux adoptions, propres à l’adoption plénière, propres à l’adoption simple) ;
IV : De l’adoption de l’enfant de l’autre membre du couple (conjoint, partenaire de PACS ou concubin) ;
V : De l’adoption internationale, des conflits de lois et de l’effet en France des adoptions prononcées à l’étranger.

Cette ordonnance a été présentée au conseil des ministres du 5 octobre (https://www.legifrance.gouv.fr/eli/rapport/2022/10/6/MTRT2222799P/jo/texte JORF n°0232 du 6 octobre 2022) comme un texte « qui facilitera le travail des praticiens du droit de l’adoption en leur permettant de prendre connaissance du régime juridique de chaque type d’adoption de manière simple, rapide et efficace ». Il est vrai que la nouvelle version du Livre I titre VIII du code civil est beaucoup plus claire que ne l’était celle qui, datant de 1966, avait périodiquement fait l’objet, y compris avec la loi du 21 février 2022, de retouches plus ou moins importantes qui en rendaient l’approche difficile.

Toutefois, en remaniant de façon « purement formelle et à droit constant », les dispositions du code civil et du code de l’action sociale et des familles telles qu’issues de la loi du 21 février 2022, l’ordonnance met en lumière quelques incohérences graves de celle-ci, en particulier et surtout à propos de la question la plus sensible de l’institution, celle du consentement à l’adoption. EFA, consultée, a soulevé à plusieurs reprises des points d’alerte à ce sujet, mais n’a pas été entendue.

Depuis la loi du 21 février 2022, les parents ne sont plus « invités à consentir à l’adoption » de leur enfant lorsqu’ils le remettent à l’ASE en vue de son admission en qualité de pupille de l’État. Il leur est seulement demandé de consentir à cette admission : c’est le conseil de famille des pupilles qui, ensuite, consentira à l’adoption si c’est le « projet de vie » qui convient au pupille. Les services de l’ASE ne devraient donc plus recevoir de consentements à l’adoption de la part des parents ou de qui que ce soit. Pourtant le législateur n’a pas supprimé du code civil que le consentement à l’adoption « peut être reçu par le service de l’ASE lorsque l’enfant lui a été remis » et qu’il « peut être rétracté par LRAR adressée au service qui l’a reçu ». Cela revenant à prévoir en même temps une chose et son contraire, est-ce vraiment faciliter le travail des praticiens, et surtout « sécuriser » le parcours des enfants dans leur intérêt ? EFA reste vigilant.

Enfance & Familles d’Adoption le 24 octobre 2022