RFI : Adoption: quel «prix» à payer pour les enfants adoptés?

Des histoires d’adoptions et souvent d’amour peuvent tourner à l’incompréhension, car une fois adultes, de nombreux adoptés se heurtent parfois à des zones d’ombres sur les conditions de leur adoption : manque d’informations, incohérence dans leur dossier voire mensonge.

Ils souhaitent comprendre pourquoi un jour, souvent très jeunes, sans leur demander leur avis, ils ont dû quitter leur pays d’origine pour vivre ailleurs, loin, très loin de leur lieu de naissance. Peut-on parler d’un scandale à l’adoption ? À travers la planète ils sont nombreux à vouloir faire bouger les lignes, changer les règles revoir les lois.

– Emmanuelle Hebert, cofondatrice de l’association Reconnaissance des adoptions illicites en France (RAIF)
– Anne Royal, présidente de l’association Enfance & Familles (EFA)
– Yves Denéchère, professeur d’histoire contemporaine à l’Université d’Angers, spécialiste de l’adoption internationale, auteur du livre « Les enfants venus de loin » éditions Armand Colin

Écouter le podcast sur le site de RFI

La newsletter EFA – bulletin n°60 – Décembre 2021

Le bulletin n°60 de la newsletter d’EFA vient de paraître.

— Les formations professionnelles d’EFA en 2022
— Violence et maltraitance : appel à témoignages pour la revue Accueil
— L’accueil durable et bénévole : un autre statut pour accueillir un enfant
— Mise en place d’une commission d’enquête sur les adoptions illicites
— Proposition de loi relative à l’adoption
— Santé mentale des enfants : le droit au bien-être

Télécharger et découvrir les newsletter d’EFA

Violence et maltraitance : appel à témoignages pour la revue Accueil

Appel à témoignage pour le prochain numéro 202 de la revue Accueil

Aujourd’hui, on parle à l’enfant adopté de son histoire première, de son abandon, avec des mots adaptés à son âge, à sa maturité et à sa situation ; on sait que l’histoire de la famille se tisse de la sienne et de celle des parents. On réfléchit beaucoup à ce « temps d’avant » si important, et l’on connaît mieux les effets des carences, du manque de soins, du délaissement, des difficultés d’attachement vécus par le tout-petit, in utero, puis dans ses premières années de vie. Qu’il soit né en France ou à l’étranger.

Pourtant, il est un sujet plus difficile à aborder, sans doute parce qu’il heurte nos cœurs et nos consciences : la violence et la maltraitance que les enfants ont pu subir avant leur adoption.

Lire la suite

Proposition de loi relative à l’adoption: l’article de la discorde

La proposition de loi relative à l’adoption a été adoptée en 1ère lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Compte-tenu des désaccords entre députés et sénateurs, le texte a ensuite fait l’objet d’une tentative de conciliation en commission mixte paritaire. Celle-ci s’est réunie le 4 novembre 2021 pour procéder à l’examen des dispositions restant en discussion.  Des points de convergence ont été trouvés sur la majeure partie du texte mais un blocage subsiste concernant l’article 9 bis. La commission mixte paritaire n’a donc pas pu parvenir à élaborer un texte commun et la proposition de loi fera l’objet d’une nouvelle lecture dans chaque chambre en janvier 2022.

L’article 9 bis en question fait l’objet de nombreuses critiques parce qu’il permettrait de prononcer l’adoption d’un enfant, né d’une PMA pratiquée à l’étranger, par la mère d’intention en passant outre le refus du consentement de la mère biologique en cas de séparation.

A lire : le rapport de la commission mixte paritaire sur le site du Sénat.

Pascale Salvage, professeur honoraire de l’Université Grenoble-Alpes a publié une analyse de cet article 9 bis sur le Forum Famille Dalloz, intitulé : “Le “fameux article 9 bis“ de la proposition de loi sur l’adoption, une mine de discriminations”. Dans ce billet, elle dénonce que cet article n’a pas sa place dans une proposition  de loi ayant pour objectif la protection de « tout enfant privé de son milieu familial ou ne pouvant y rester » (exposé des motifs de la proposition) et démontre que cette disposition temporaire applicable aux seules femmes déjà mères d’intention et déjà séparées de la mère biologique de l’enfant est discriminatoire.

A lire : Les commentaires EFA sur les modifications apportées au texte par le Sénat.

 

Relatif au même sujet :

Conseils de famille des pupilles de l’État : Rester unis autour des besoins et du projet de chaque enfant (16 janvier 2021).
Proposition de loi relative à l’adoption: l’article de la discorde (15 décembre 2021).
Proposition de loi visant à réformer l’adoption, première lecture au Sénat (1er novembre 2021).

Swissinfo : Des enfants sri-lankais enlevés ont été adoptés en Suisse

Un rapport sur les adoptions illégales d’enfants sri-lankais en Suisse établit un lien évident entre ce trafic et des disparitions forcées, selon Olivier de Frouville, expert en droits humains auprès de l’ONU.

En mai dernier, la Suisse a été sommée de faire la lumière sur les adoptions illégales au Sri Lanka pendant trois décennies dès les années 1970. Berne doit vérifier si des enfants ont été victimes de disparitions forcées ou d’autres infractions et garantir des réparations aux victimes. Telles sont les recommandations du Comité sur les disparitions forcées (CEDLien externe), dont le vice-président est l’expert en droits humains Olivier de Frouville…

Swissinfo.ch (3 septembre 2021)

Joséphine Baker au Panthéon : la mère d’une tribu Arc-en-Ciel inspirante

C’est l’histoire d’une famille extraordinaire. Quand elle a l’idée d’adopter des enfants, Joséphine Baker a en tête de reformer un petit monde venant de tous les continents et de toutes les couleurs. Elle pense à une tribu arc en ciel qui serait symbole de tolérance et de fraternité universelle.

Tout au long de sa vie, Joséphine Baker mêle intimement sa vie personnelle et sa vie publique au motif que ses expériences, comme celle du racisme, sont toujours les racines d’un combat qu’elle a à mener.

Dès son arrivée en France, Joséphine Baker est fascinée par l’idée que la France ne soit pas un pays où sévit la ségrégation à l’américaine.
Elle se sent libre et acceptée comme jamais.

La naissance de la tribu arc-en-ciel-en-ciel
De ce fait, alors qu’elle sait qu’elle ne pourra jamais enfanter, après avoir subi une hystérectomie en catastrophe à la suite d’une grossesse pathologique, l’idée d’adopter fait son chemin.
Quand elle épouse Jo Bouillon en 1947, elle est déjà très active au sein de la Ligue internationale contre l’antisémitisme. Elle sent la France prête à accueillir une société multicolore et multiraciale.

La décision est prise au sein du couple, sous l’impulsion de Joséphine. Il est temps de faire tomber les préjugés, des enfants venus de tous pays, de toutes cultures et de toutes confessions peuvent se considérer comme frère et sœur.
L’humanisme plutôt que le culturalisme : ce sont là les bases de la tribu arc-en-ciel.

France 3 Nouvelle Aquitaine (26 novembre 2021)

Le Monde : Enquête « Les filières de l’adoption internationale ».

Enquête« Les filières de l’adoption internationale ».

Ces soixante dernières années, des centaines de milliers d’enfants d’Amérique latine, d’Asie, d’Afrique ont été adoptés par des couples européens ou nord-américains, parfois au mépris du droit. Devenus adultes, certains recherchent la vérité sur leur histoire.

Sur les murs du bureau, des dizaines de photos ternies par le temps. Des gens se sourient, s’embrassent. « Là, ce sont les premières retrouvailles que nous ayons organisées, un papa avec sa fille… En 2001. » Marco Garavito s’émeut toujours autant devant ces images, fruits de plus de deux décennies de labeur. Cet homme de 70 ans est le responsable de Todos por el reencuentro (« Tous pour les retrouvailles »), un des programmes de la Ligue guatémaltèque de la santé mentale, une organisation de soutien psychologique spécialisée dans la recherche des 5 000 enfants disparus pendant le long conflit armé entre les militaires et la guérilla marxiste (200 000 morts entre 1960 et 1996).

De 1971 à 1992, près de 2 200 enfants chiliens ont été adoptés par des Suédois, presque tous par l’intermédiaire de l’organisme Adoptionscentrum. Alors qu’une enquête a été ouverte au Chili pour trafic d’enfants, ils exigent des explications. Bonnet andin sur la tête, engoncé dans une veste polaire, Daniel Olsson se réchauffe les mains sur une tasse fumante. Cet homme de 43 ans, mais qui en fait quinze de moins, est assis devant la maison de sa petite amie, à Temuco, une ville de 260 000 habitants située dans le sud du Chili. Nous sommes en mai 2021. Joint en visio par WhatsApp, Daniel Olsson déroule son histoire, « digne d’un roman de Dan Brown », pendant près de trois heures. S’il lui arrive encore de revenir en Suède, c’est en coup de vent. « Dès que j’atterris, je me sens mal. Au Chili, au moins, j’ai une deuxième chance de devenir celui que j’aurais dû être. » Drôle de formule pour résumer sa quête d’identité, un chemin sinueux où ses différentes vies s’entremêlent.

En Europe, aux Etats-Unis et ailleurs, les personnes adoptées à l’étranger ces dernières décennies luttent pour remonter le fil de leur histoire. Longtemps indifférents, certains pays doivent s’adapter et reconnaître leurs négligences passées.
Ils sont Belges, Français, Israéliens, Canadiens, Irlandais, Danois, Suédois… Des femmes, des hommes, tous nés au Guatemala, tous adoptés, porteurs d’une histoire personnelle tourmentée et d’une farouche volonté de « savoir ». Une fois devenus adultes, ils ont voulu partir en quête de leurs origines, et se sont heurtés au même mur : incohérences dans leurs dossiers, informations parcellaires…

L’enfant de personne

Lyes est brutalement arraché à Émilie, la mère d’accueil qui l’a recueilli bébé, et qui désirerait pourtant l’adopter. L’enfant se retrouve ainsi confronté à la violence des foyers de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), qui refuse de couper le lien avec la mère biologique, pourtant incapable de s’occuper de lui. Agathe, la sœur d’Émilie, n’a jamais abandonné l’enfant. Elle va se battre contre le système pour tenter de maintenir un lien avec lui, décidée à le recueillir chez elle pour l’aider à se reconstruire…

https://www.france.tv/series-et-fictions/telefilms/2882457-l-enfant-de-personne.html

True mothers

Le film porte bien son nom et en dit long : deux femmes ont un enfant en partage, toutes deux mères et toutes deux légitimes.

Satoko et son mari sont liés pour toujours à Hikari, la jeune fille qui a donné naissance à Asato, leur fils adoptif. Aujourd’hui, Asato a 6 ans et la famille vit heureuse à Tokyo. Mais Hikari souhaite reprendre contact avec les parents d’Asato et va provoquer une rencontre. Des flash-back nous content comment les personnages en sont arrivés à ce point. Comment Hikari, amoureuse de son premier flirt à 14 ans, tombe enceinte et est contrainte par sa famille de confier son bébé à la naissance. Sa grossesse se déroule dans un refuge de jeunes mères démunies où elle rencontre d’autres jeunes femmes en rupture de ban. Après la naissance, commence pour la jeune fille esseulée une vie d’errance. De son côté, le couple tente vainement de concevoir un enfant, a recours à la PMA et, d’espoir en déception, décide de faire sien un enfant qu’il n’a pas conçu. Les trois protagonistes se rencontrent une première fois alors qu’Asato vient de naître et qu’il est remis à sa nouvelle famille. Émotion garantie !

Les scènes sont toujours justes et admirablement interprétées, le sujet est traité avec sobriété dans toute sa complexité, peut-être parce que la réalisatrice, elle-même adoptée, connaît intimement la question…

https://www.hautetcourt.com/films/truemothers/

Commentaire publié dans la revue Accueil n°201

Chasseur, cueilleur, parent – Michaeleen Doucleff

Un livre de plus sur la parentalité et l’éducation ? Pas tout à fait car il s’agit d’un livre original, dont l’autrice est allée très loin cueillir ce qu’elle nous propose, avec un regard décalé et peut-être plus clairvoyant sur ce qui nous entrave.

Au bord du burnout parental, Michaeleen Doucleff, journaliste scientifique, décide de partir vivre avec sa fille dans des communautés de chasseurs cueilleurs, ces cultures qui affutent leurs stratégies éducatives depuis des milliers d’années, pour tenter de comprendre ce qui ne fonctionne plus dans notre façon occidentale d’éduquer les enfants. Alors que nous perpétuons des relations fondées sur les conflits et la peur, les parents chasseurs cueilleurs vivent la coopération et la confiance avec leurs enfants. Comment font-ils ?

Après un démarrage un peu long, visant à définir notre problématique occidentale (une conception éducative focalisée sur les recherches occidentales, une famille nucléaire, une routine parentale qui s’est emballée, la pression de la performance), on entre au bout de 80 pages dans le vif du sujet avec une plongée dans la culture maya. À partir de là, l’autrice nous entraîne dans une quête passionnante, mêlant le récit de ce qu’elle vit avec sa fille et ses observations, ses questionnements, les pistes éducatives et concepts qu’elle en tire, étayés par le regard scientifique de professionnels (psychologues, ethnopsychiatres…).

De l’éducation maya, elle retient la tendre camaraderie, cette facilité qu’ont les parents à associer les enfants à leurs activités du quotidien, à sortir du contrôle pour favoriser la collaboration. En Tanzanie, les parents hadza valorisent l’autonomie au point de se donner beaucoup de mal à ne pas dire aux enfants ce qu’ils doivent faire car ils sont convaincus que l’enfant sait comment apprendre et grandir. Quant aux parents inuits, ils ne crient jamais, jamais : ils s’attendent au comportement inapproprié de l’enfant, car c’est dans sa nature, il n’est pas mature !

Tout au long de ce livre, Michaeleen Doucleff pointe ce qui différencie notre modèle de ceux qu’elle explore : la solitude des parents occidentaux. Dans la famille nucléaire, la mère (et le père) est la seule camarade, seule source d’amour, seul lien social, seul divertissement et seule stimulation. Ailleurs, elle constate la force de la coopération silencieuse entre adultes au sein de communautés qui partagent les mêmes valeurs éducatives, ce qui permet à l’enfant de trouver des ressources auprès d’autres membres de la famille, d’amis du couple parental, de voisins parfois… S’il est vrai que dans le cas de nos enfants adoptés, certains conseils stéréotypés sont parfois mal appropriés, permettre à l’enfant d’observer d’autres pratiques, de trouver d’autres soutiens est aussi une richesse !

Alors, si vous ne craignez pas d’être bousculé, de questionner vos pratiques parentales, vous aimerez ce livre préfacé par Isabelle Filliozat, qui retrouve ici ses thèmes de prédilection comme l’autonomie, la gestion des émotions… Michaeleen Doucleff oriente les projecteurs sur des besoins de nos enfants que nous pourrions oublier, nous les parents adoptifs, centrés que nous sommes parfois sur le défi essentiel de (re)créer attachement et sécurité. Elle nous parle de leurs besoins de contribuer, de coopérer, de liberté, de reconnaissance qui pourraient bien renforcer autonomie, confiance et appartenance !

Michaeleen Doucleff, Chasseur, cueilleur, parent, Leduc Éditions, 2021

https://www.editionsleduc.com/produit/2579/9791028521592/chasseur-cueilleur-parent

Ce commentaire a été publié dans le numéro 201 de la revue Accueil